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I saw the best minds of my generation…

A man who’s pure of heart and says his prayers by night 
May still become a wolf when the autumn moon is bright

- Florence And The Machine

Howl

Holy the supernatural extra brilliant intelligent kindness of the sou l!

- Allen Ginsberg

footnote to Howl

Berkeley, 1955

Ce que j’aime chez VOIR aujourd’hui, c’est que celui qui dit « Le mythique poème Howl d’Allen Ginsberg est le personnage principal d’un film qui illustre avec brio la raison d’être de la poésie. » s’appelle Antoine Léveillée.

L’éveillé.

Pour que vous sachiez de quoi nous parlons aujourd’hui, en ce dimanche de Pâques où le coeur de l’humanité accidentée fête la résurrection d’un messie encastré sur la croix de l’esclavage endimanché, voilà la référence à consulter :

Howl, bande-annonce sur Youtube

Et le personnage principal du film n’est pas vraiment Ginsberg lui-même, mais plutôt l’une de ses oeuvres mythiques.

Une oeuvre dont on parle encore aujourd’hui malgré le fait qu’à l’époque du procès, on ne reconnaissait  à ce poème aucune valeur littéraire et, pire encore, on ne lui accordait aucune chance de survivre au passage des années et des générations.

Enfin, c’est ce qu’on affirmait du côté de l’accusation.

Aujourd’hui, nous connaissons notre partie de la Vérité. De notre point de vue, l’oeuvre littéraire survit vaille que vaille dans les sphères les plus élevées du Savoir littéraire institutionnalisé. Ginsberg a étudié à l’université Columbia aux États-Unis et on étudie maintenant Ginsberg dans toutes les facultés de littératures où la poésie du XXe siècle américaine a droit de cité. A le droit d’être citer à comparaître à nouveau.

Toujours devant le même cercle fermé de privilégiés.

Un peu comme ce jury, ce public présent en cour de Justice que l’on aperçoit dans le film. Un peu comme ce juge éclairé qui refusera de condamner pour insalubrité spirituelle un poème écrit avec les mots choisis par la vie elle-même afin d’exprimée un cri artistique se rapprochant un tant soit peu de sa Vérité.

De son authenticité d’auteur et d’être humain écrivant.

L’authenticité d’une voix. On en parle beaucoup aujourd’hui.

On la mime, on l’imite, on la simule, on la projette comme une image, cette glorieuse authenticité tant recherchée aujourd’hui, en cette époque marquée au fer blanc des médias sociaux.

Qui transmet le mieux le son creux de sa personne en aluminium cadenassé ? Qui démultiplie le mieux son JE à des milliers de partisans enchanté par un nouveau visage de la modernité ? ‘Scusez, de la post-modernité. La modernité qu’on poste sur internet. La modernité à son poste, devant le PC. Le fameux personnal computer. Vous le trouvez si « personnel » que ça votre ordinateur ?

Personnellement, je tape sur un Gateway NV79 qui m’a été offert par ma mère.

Eh oui, même pas foutu de m’acheter un lap top avec mon propre salaire de langue sale !

Comme c’est amusant. Mais ô combien au-then-ti-que.

Je suis authentique. C’est moi qui vous le dit en prenant cet air entendu mille fois et factice. Ce clin d’oeil familier en guise de ponctuation finale à l’entrée de ce blogue Image may be NSFW.
Clik here to view.
;-)

L’informatique et son usage transforme même l’usage de la ponctuation dans un texte.

L’informatique miniaturise la pensée, dit-on.

J’ai fait nombre d’expériences sur Twitter qui prouve que ce n’est pas vrai. Enfin, que ça ne participe pas de ce que je perçois être la vérité.

Car chacun a son morceau de la réalité comme chacun a son morceau de chocolat a briser aujourd’hui pour communier avec l’économie de marché. Ce chacun est bien sûr fortement exagéré. C’est une généralité, comme on en voit plusieurs traîné dans les journaux en ce moment. Appelons-là pour les besoins de la Cause, une généralité inversée pour un monde qui avance cul par-dessus tête avec l’air de triper.

(To trip : verbe anglais qui veut dire ? Laissez tomber.)

L’économie de marché, vous êtes-vous jamais demandé, pourquoi cela ne prend pas de S à la fin ? Il y a pourtant plusieurs marchés. Il y en a même des « super » et des « super branchés ».

En fait, l’idée derrière cette question en forme de tête fromagée, c’est de faire remarquer qu’il n’y a qu’un marché derrière l’économie de marché.

C’est le double fond de l’économie dont tout le monde veut se faire le défenseur acharné, en politique, aujourd’hui.

Et ce marché de dupes dit: le capitalisme doit être libéré.

Le capitalisme sauvage, ce Moloch évoqué par Ginsberg dans son poème, c’est le capitalisme sauvage une fois pour toute déchaîné sur le monde, dévorant l’humanité de sa grande bouche de brillant fer forgé.

Mais, bien entendu, rien à VOIR avec le commerce du coin, ce fameux capitalisme sauvage débridé.

Rien à VOIR avec la PME du village.

Rien à VOIR avec la coopérative engagée dans sa communauté.

Non. Il s’agit plutôt de ce capitalisme pirate et spéculatif qui déplace les capitaux comme Neptune lui-même commandait aux eaux de s’élever ou de s’évacuer d’un endroit impie, infidèle à son culte ou sa cupidité.

C’est la beauté de certaines institutions privées et publiques, aujourd’hui. Elles sont d’une dimension si imposante qu’elle finisse par générer leur propre mythologie, leurs rituels sacrés, leurs maîtres du culte, etc.

D’ailleurs, Pâques reprend sa forme d’origine avec la marchandisation de ce qui hier était considéré comme sacré.

Toutes ces fêtes, toutes ces célébrations rythmant la cadence et l’essor de nos vies, elles existaient déjà avant que la religion catholique romaine y impose son sceau d’approbation sacré.

Beaucoup se plaignent avec raison, aujourd’hui, au Québec, que l’on enseigne pas assez l’Histoire.

Mais sachez que toute bonne Histoire, même celle de l’Humanité, vient avec sa pré-histoire, sa mémoire préhistorique.

Je sais. Ça ne va pas rendre la tâche facile à ceux et celles qui sont chargés par l’État providence pour enseigner les choses de la vie aux enfants d’aujourd’hui et de demain.

L’État providence qui n’assure plus vraiment le rôle imposant occupé auparavant par l’Église, au Québec.

L’État omniprésent constamment dénoncé. Trop obèse, dit-on, même.

Il est assez ironique que de gros capitalistes parvenus ou de gros économistes chevronnés nous parlent d’un État souffrant d’embonpoint comme si c’était un régime détestable à soutenir.

Comme si l’excès dont il faisait eux-mêmes preuve ne voyait pas grâce à leurs yeux lorsqu’il s’agit de l’État.

Mais je vous vois venir avec votre argument des économistes maigres et bien élancés. Tranchants comme une lame. La lame de la hache avec laquelle Duhaime et compagnie voudrait attaquer le modèle québécois, et même canadien, en ce moment.

Que fait-0n de ses curés du néolibéralisme qui ont entre les mains tous les chiffres et tous les graphiques pour nous prêcher une saine période d’austérité ?

Leur rappeler que tout ce poids accumulé se fait au profit d’une réélection continuelle. D’une indifférenciation politique progressive.

Je ne suis pas d’accord avec ceux qui disent avec mépris que les gouvernements démocratiques gouvernent en s’inspirant des sondages. Il s’inspirent aussi des groupes de discussion également. Peut-être même aussi des médias sociaux.

Ce n’est pas le gouvernement par sondages qui m’irritent, c’est le mépris qu’on lui rattache.

Ce n’est pas l’absence de « principes » et d’idéologie cohérente que je reproche aux gouvernants de notre époque.

Au contraire. J’aime mes politiciens drabes, ennuyants comme la pluie et même très peu populaires.

Les politiciens purs et durs qui charismatisent à tout va me font horreur.

Ils me rappellent que Lévesque et Trudeau se sont battus comme des diables dans l’eau bénite sans jamais mettre véritablement K.O. l’adversaire puisque d’adversaire ils n’avaient qu’une piètre vision d’eux-mêmes à trouver, à offrir.

Je me méfie des gens qui fondent tout leur combat politique sur une idéologie puisque l’idéologie présente et dominante est déjà ici.

Lui en substituer une autre, à quoi bon ?

Elle sera plus efficace, moins immonde ?

Non.

Ce dont l’humanité souffrante a besoin, c’est de compassion. Ce dont la vie publique a besoin, c’est plus de civisme. Ce dont la politique a besoin, c’est d’arrêter de croire qu’elle changera le monde.

Le monde change, peu importe les politiques que l’on essaient d’instaurer.

Regardez les conservateurs, à Ottawa, s’entre-déchirer, redevenir ce qu’ils ont toujours été: un groupe des forces de l’ARC. Alliance-canadienne Réformiste Conservatrice.

Une coalition qui est en train d’imploser parce que le conservatisme moral et le conservatisme économique sont en train de s’écraser.

Regardez le parti québécois, à Québec, récolter ce qu’il a si bien semer jusqu’ici : l’insatisfaction populaire généralisée.

L’opprobre. La désaffection. Le désengagement.

Est-ce à dire que le Parti libéral du Québec était plus brillant ? Non, mais, comme le disait presque Françoise David, il n’allait jamais aussi loin que de s’attaquer au plus démunis avec autant de témérité. Elle oubliait probablement Robert Bourrassa et ses boubous macoutes mais, que voulez-vous, on ne peut pas tout se rappeler. Même wikipédia est assez peu éloquent à ce sujet. Alors, on peut bien lui pardonner cet oubli, en matière d’attaque envers les moins favorisés de notre société.

Les assistés sociaux, comme on dit.

Les bénéficiaires du bien-être social, comme on disait si bien à l’époque.

J’ai fait partie de ces assistés bénéficiant de ce que la société de l’époque qualifiait de bien-être social. Je peux vous dire que ce n’était pas le « bout de la marde », comme on dit encore aujourd’hui, mais que c’était le minimum requis pour ne pas avoir l’air de ce que l’on veut devenir aujourd’hui.

Des sans-coeur par politiciens interposés. Des pas de classes, par classe moyenne interposée. Des sans-âmes, par l’église catholique et romaine oubliée.

Toutes ces âneries sur la gauche et la droite. Toutes ces chicanes de clochers sur le à qui revient taxes et impôts lorsque vient le temps de se fédérer ou s’individualiser souverainement. Toute cette merde au service d’une idée, d’un principe, d’une juridiction, d’une économie.

Vous savez où vous pouvez vous la fourrer ?

Profondément dans le porte-feuille. Parce que c’est vous qui allez de toutes façons payer pour les pots cassés à la fin de la journée.

Je dis vous parce que je me sens un peu plus étranger dans mon propre pays.

Que l’on parle du pays réel ou du pays rêvé.

Que l’on parle de poésie ou de politique, c’est toujours la même idée qui prime. Qu’en reste-t-il de bon à la fin de la journée ?

Même chose pour la religion.

Va-t-on vraiment obliger des milliers ou des millions ou centaines de millions de gens à s’en remettre à la bonne providence pour sortir de la pauvreté et de la mendicité parce qu’on ne peut plus s’offrir le luxe de prendre soin de nos concitoyens les plus démunis face à la vie qu’on mène ou qui nous mène par le bout du nez à notre perte dans la marge de plus en plus mince du profit ?

Payer moins d’impôts, vous croyez vraiment que vous avez inventez ça, comme concept ?

Payer moins de taxes, vous croyez vraiment que c’est né d’hier, cette glorieuse idée fixe ?

Mais, au fond, ce n’est pas ça le problème, pas vrai ?

Le problème, c’est l’homosexualité, la marginalité qui s’infiltre dans les branches du pouvoir, ce sont les familles reconstituées de peine et de misère, ce sont les gens qui fuient la ville livrée à elle-même et à sa corruption galopante.

Le problème, c’est la jeunesse, non, une partie de la jeunesse qu’on envoie à l’école apprendre à VOIR les problèmes nous fondre dessus refuser de marcher au pas cadencé, au pas séquencé, de ne pas suivre le rythme de la révolution technologique qui avale le monde avant de nous le recracher au visage en morceaux éclatés. Qui nous promet que tout sera gratuit, toujours et tout le temps et que rien de se savoir numérisé ne sera un jour tarifé. Que la réglementation absente en matière de commerce numérique soit inexistante ne devrait en aucun cas nous inquiéter ou nous mettre la puce à l’oreille.

Non, la puce, elle est déjà dans l’ordinateur « personnel » que j’utilise en ce moment.

Même la fameuse Royal Quiet de Luxe d’Hemingway n’avait rien d’un outil « personnel ». C’est l’écrivain qui personnalise la machine.

C’est l’humain qui se sert de la machine.

C’est l’être humain qui sert la machine, en ce moment. Pas l’inverse. Que le système d’exploitation porte le nom d’Androïd ne devrait pas être passé sous silence. L’internaute, c’est le cosmonaute de l’hyperespace. C’est ce paranoïd androïd si bien imaginé par Radiohead à la fin d’un autre siècle qui est toujours le nôtre.

C’est la première leçon de tout texte qui se veut être de la littérature. Celui d’être en mesure d’avaler le monde avant qu’il ne soit lui-même avaler.

Oui, je sais. C’est un foutu long détour pour aboutir au pied du même escalier, comme dirait Piché.

Mais c’est ça quand même.

C’est tout de même ce que je vois dans l’oeuvre mise en procès dans ce film.

Je vois les meilleurs esprits de ma génération matraqué par le confort et l’indifférence des années 1980 dans laquelle j’ai grandi réclamer les enfants d’aujourd’hui afin de les envoyer eux aussi crever dans le ventre de ce dieu auquel les Ammonites, une ethnie cananéenne, sacrifiaient leurs premiers-nés en les jetant dans un brasier.

Mais, surtout, ce qu’il y a de bien dans Howl, c’est qu’il peut servir de pense-bête, de fond d’écran à une autre génération sacrifiée.

Ce qu’il y a de rassurant dans Howl, c’est qu’il peut devenir un succès populaire et critique à son époque même. C’est que la Justice de l’époque tourmentée illustrée de manière hallucinée dans ce film, et le climat politique tout aussi délirant que celui dans lequel nous baignons aujourd’hui n’a pas pu résister à la beauté d’une poésie, d’un récit généreux dédicacé à un ami ayant perdu la raison dans les griffes d’une société chaque jour un peu plus sur le point de perdre son humanité en essayant de gagner le minimum vital pour essayer d’y survivre.

Ce qu’il y a d’encourageant dans Howl, c’est sa victoire sur la haine. C’est sa victoire sur tout ce qui sort du cadre d’une certaine humilité.

Ce qu’il y de beau dans le poème lui-même, c’est ce message d’espoir qui peut résonner et qui a toujours résonner au coeur de toute l’histoire de l’humanité.

Howl est avant tout un cri. Un long cri qui s’étire dans la nuit. Dans cette nuit américaine des déshérités de la terre, des exclus du cercle fermé de la respectabilité politique. C’est avant tout un rappel d’une compassion en circuit fermé, enfermé dans des bars enfumés avant de sortir respirer au grand air.

Howl est aussi un refuge, une critique, une prière esthétique, un délire à la fois comique et tragique. Un discours férocement authentique.

Une complainte. Un désir. Une célébration inconditionnelle de la vie.

Un calvaire, un sacrifice, une délivrance, un poème, une déclaration d’amour hypnotique, un cauchemar embrassant l’espérance au sein d’un même être humain rachitique.

Howl, c’est la traduction littéraire d’une méditation profonde et d’un souffle éternel.

Howl, c’est un rappel, c’est un film, c’est ce qui se passe à l’écran et autour de l’écran. C’est ce qui se passe dans le coeur de celui ou celle qui a encore assez de souffle pour le suivre, pour en comprendre intuitivement le rythme, le lien avec le Québec, avec Kérouac, avec ce Québec en exil, ce Québec plongeant ses racines dans toutes les routes de ce continent magnifique.

Howl, c’est la libération d’une parole sainte, mainte fois sainte, comme le texte lui-même le répète sans qu’on y prête la moindre attention.

Howl, c’est un long hurlement par écrit. Qui monte vers la lune et qui descend au plus profond des ténèbres humaines.

Ce poème est un conte pour enfant destiné à l’adulte qui ne sait plus comment se sauver, trop occupé qu’il est à se perdre dans des raisonnements inutiles.

Je me suis toujours demandé comment débute et comment se finit un poème.

Pourquoi un poème est plus ou moins long qu’un autre.

Quand le poète décide-t-il que son texte est fini ? Qu’il a tout dit ce qu’il avait à dire ? Quand vient le temps de faire le ménage ou de faire la vaisselle ? Quand vient le temps de sortir le chien ou d’embrasser sa femme sur les lèvres - sans préciser lesquelles ?

Ce que je comprends avec Howl, c’est que la fureur évocatrice de la littérature n’a de fin que lorsque la fureur de vivre de l’humanité qui la lit, qui s’y lie, s’évanouit virtuellement ou non de ce monde.

If you memory serves you well

I will confiscate your lace.

Puisque c’est dimanche, dimanche de Pâques par-dessus le marché, pourquoi ne pas offrir le mot de la fin à feu Ginsberg lui-même, le pape François lui-même, je crois, n’y verrait pas d’inconvénients…

Footnote to Howl


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